Soutenance de thèse en sociologie de Alexandre Guérillot
Soutenance de thèseDes rapports sociaux de sexe certifiés en agriculture biologique. La division sexuelle du travail à l'ère agroécologique
Cette thèse prend pour objet les recompositions de la division sexuelle du travail dans des exploitations certifiées en agriculture biologique (AB). Il s’agit d’explorer les transformations du travail et de l’emploi, de la structure des exploitations induites par l’écologisation des pratiques agricoles, et la façon dont elles reconfigurent les rapports sociaux de sexe.
L’enquête s’est organisée autour de quatre monographies d’exploitation en maraîchage intensif, et en grandes cultures céréalières, en France et en Espagne. L’objectif était d’observer une série de paramètres susceptibles d’affecter la division sexuelle du travail : rapport capital/travail ; structure en termes d’emplois des collectifs de travail ; avancement dans la carrière des chef·fes d’exploitation ; « modèles » de pratiques agroécologiques défendus ; mode d’articulation exploitations/familles exploitantes ; politiques publiques et contextes nationaux et régionaux des activités agricoles.
La première partie défend l’idée matérialiste selon laquelle la compréhension de la mue écologique de l’agriculture ne peut pas faire l’économie d’une sociologie du travail agricole et de sa division. Tant le verdissement des politiques agricoles, que les mouvements agroécologiques contestataires, prescrivent des transformations d’un travail organisé par l’ordre des rapports sociaux de sexe.
Dévoiler les recompositions de l’ordre des sexes dans des exploitations invite à considérer le point de vue et les positions de l’ensemble des individus qui participent au travail. Les deuxième et troisième parties analysent les effets conjugués sur les collectifs de travail des pratiques agroécologiques et des mutations de l’articulation entre famille/exploitation. En AB, la diversité de statuts d’emploi et des groupes sociaux indiquent qu’il est essentiel que l’analyse de la division sexuelle du travail tienne compte des rapports de classe au sein des collectifs.
La quatrième partie, en déplaçant le regard sur l’activité de production agricole elle-même, met en lumière l’antagonisme des rapports de sexe autour des usages et des appropriations des espaces de travail. Si les agricultrices investissent désormais les tâches culturales, l’enquête donne à voir une division du travail opposant une conception toujours masculine des systèmes de cultures et des travaux culturaux d’exécution partagés. Cette situation doit beaucoup à un sous-équipement féminin et à un gap technologique persistants en agriculture biologique.
Faire advenir l’écologie des activités agricoles implique aussi de s’employer à la faire reconnaître. La cinquième partie décrit la division de ce travail sur deux scènes historiques du travail féminin : le travail administratif et la transformation/vente. Dans le cas de la première, la division du travail entre les sexes dépend des possibilités de l’externaliser (différentes entre l’Espagne et la France). Le travail administratif restant se répartit entre agricultrices et agriculteurs, selon son articulation au travail productif ou reproductif. Quant à la seconde, le travail commercial, la désintermédiation marchande de la vente d’une production étiquetée comme écologiquement vertueuse remasculinise la vente au contact direct avec la clientèle. Le travail hors champ de vision, préparatoire aux actes de vente, se répartit entre les sexes selon le degré de parcellisation des tâches et la charge mentale qu’elles impliquent.
Le jury sera composé de :
- Christophe GIRAUD, Professeur à l’Université Paris Cité, Examinateur
- Hélène GUETAT, Professeure à l’Université Toulouse Jean Jaurès, Examinatrice
- Clotilde LEMARCHANT, Professeure à l’Université de Lille, Directrice de thèse
- Geneviève PRUVOST, Directrice de recherche au CNRS, Rapportrice
- François PURSEIGLE, Professeur à l’Ecole Nationale Supérieure Agronomique de Toulouse, Rapporteur
- Alberto RIESCO SANZ, Profesor Contratado Doctor/Universidad Complutense de Madrid, Examinateur
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